Montessori : de l’importance de l’observation

Observer est une posture très active qui requiert motivation et volonté, oblige à restreindre notre propension à faire.

Elle nous amène aussi à questionner nos croyances sur l’éducation en général, tout comme nos attentes vis-à-vis de cet enfant en particulier.

Ce regard neutre et bienveillant alimente un besoin essentiel au développement de l’enfant, qui ressent sous ce regard, cette écoute, qu’il peut se montrer tel qu’il est : en construction. C’est également une nécessité pour l’éducateur. En nous rendant à l’école de notre enfant, nous éclairons nos choix éducatifs et pédagogiques, afin de seconder son ‘énergie créatrice’.

À de multiples occasions, nos yeux et oreilles exercés nous rendent témoins des petits miracles d’une vie d’enfant qui cherche à devenir un homme.

Nous voici devenus des « observateurs de l’humanité » !

L’observation de l’autre : un pilier de l’éducation Montessori

J’observe la vie qui m’entoure dans une attention flottante et mon regard s’arrête sur Marguerite, trois ans et demi, qui sort de la salle d’activité et se dirige vers Pablo dont elle est proche, pour lui tendre la main afin de prendre place dans un cercle qui se constitue.

Il ouvre le cercle et l’accueille.

Mais je m’étonne, car la voilà qui refuse de prendre la main tendue d’une autre personne qui s’empresse de l’intégrer à la ronde.

Est-ce parce qu’elle connait moins Maud ou parce que ce n’était pas de son initiative ?

Mon questionnement est de courte durée car à peine deux secondes s’écoulent et voilà Marguerite qui se tourne vers Maud et, et tandis qu’elle hausse les épaules bien haut comme quand on est dépité, et lui dit non de la tête avec vivacité (deux gestes à mimer simultanément pour comprendre la complexité du geste), elle ouvre une main (je n’avais pas vu qu’une des mains était refermée), et lui révèle quelques bricolages qu’elle vient de réaliser et qui y sont déposés.

Un bien précieux qui ne lui permet pas de répondre à l’invitation et d’entrer complètement dans la ronde.

Marguerite donne ainsi à comprendre en silence et de tout son corps, le motif de son refus. Il y a dans ce moment-là, chez cette petite fille une affirmation d’elle-même et une capacité d’attention à l’autre.

Sens moral, sens social et liberté personnelle s’additionnant chez Marguerite, révèlent toute la promesse de son être. Tout cela s’est passé en un bref instant – même pas une minute !

Et faut-il le préciser ? Dans une communication totalement non verbale. Qui l’a vu ? Au moins moi. Pour voir, il s’agit de s’exercer rappelle Maria Montessori. Je ne m’en lasse pas. Cela vaut de l’or tout en étant totalement gratuit.

D’un grand-père à son petit-fils

J’écoute Philippe à l’occasion d’un repas amical où nous sommes placés côte à côte :

« Je ne sais pas pourquoi mais cela passe bien entre mes petits-enfants et moi. On se parle beaucoup, ils me questionnent sur des sujets importants. »

Et la conversation va bon train avec ce papi de 65 ans qui me parle de son histoire d’enfance dans l’est de la France, au cœur d’un village un peu isolé.

Un peu plus tard, dans la conversation, il m’évoque plus précisément les moments vécus avec son grand-père qu’il a toujours connu aveugle et néanmoins bon marcheur. Et il explique comme s’il y était encore, ce qui se passait entre eux :

« Il posait la main sur mon épaule et nous voyagions ainsi ensemble. Que pouvions-nous faire d’autre que parler ! »

Et moi, aussitôt de faire un lien, que je ne puis m’empêcher de lui faire remarquer :

« Philippe, cette belle relation que vous vivez avec vos petits-enfants, je sais d’où elle vient ! »

Toutes générations confondues, le besoin de communication est dans la nature de l’homme et sa mise en œuvre laisse des traces. Philippe en a fait une expérience heureuse et durable.

Cela lui rend plus naturelle l’attitude de présence à ses petits-enfants qui le ressentent bien.

Vivre des relations humaines, comme ce fut le cas lors de ce repas partagé, est une occasion privilégiée de prendre conscience que nos histoires d’hier et d’aujourd’hui sont liées et qu’elles ont beaucoup à nous apprendre.