Éduquer des jumeaux en respectant leur autonomie

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Pour ce billet, je vais un peu m’écarter de la pédagogie Montessori en tant que telle, mais tout en restant dans le champ de l’éducation. Avec un sujet qui m’est cher, celui des jumeaux et de leur autonomie, puisque j’ai moi-même une soeur jumelle.

Vrais ou faux jumeaux, quelle est la différence ?

Les vrais jumeaux (monozygotes) sont issus du même œuf et ont grandi ensemble in utero, à l’intérieur du même nid. Ils sont donc génétiquement identiques. Les fœtus des vrais jumeaux se développent au sein d’un même placenta et ont le même sexe. 

Ils se ressemblent comme deux gouttes d’eau mais n’ont pas les mêmes mensurations : l’un des deux est souvent plus gros que l’autre. 

Les faux jumeaux (dizygotes) proviennent de deux ovules différents.

Ils sont génétiquement différents puisqu’ils sont issus de deux fécondations différentes. Ils ne sont pas nécessairement du même sexe et peuvent ne pas se ressembler.

La complicité des jumeaux

Depuis toujours, les fœtus jumeaux partagent tout, le nid et l’ensemble des vibrations qui leur arrivent de l’extérieur. Ils entendent aussi les battements de leur cœur mutuel. Pour eux, la vie a toujours été double et pendant la petite et la grande enfance, beaucoup de jumeaux s’étonnent de ne pas être la « normalité », car pour eux tous les enfants sont élevés par deux. 

Pourquoi leurs liens sont-ils si forts ?

Les mamans de deux jumeaux ne peuvent pas combler leurs deux enfants en même temps. Les manques qu’elles créent quand elles ne sont pas là ou quand elles sont occupées avec un autre enfant, les jumeaux se les comblent mutuellement. Ils sont une présence, « le double » protecteur. En tant que jumeaux ont se sent jamais vraiment seuls, en tout cas durant la petite enfance…  Et l’habitude est vite prise de compter systématiquement l’un envers l’autre.

Sont-ils « identiques » ?

Des jumeaux ont beau se ressembler physiquement, ils ont deux personnalités distinctes qui, normalement, doivent s’affirmer au fil des années. 

Une paire de jumeaux constitue un véritable duo dans lequel chacun est complémentaire de l’autre. Il n’est donc pas rare de voir l’un ou l’autre des jumeaux exercer une certaine dominance sur son frère ou sa sœur : celui qui est né le premier, celui qui est le plus fort, le plus grand ou qui fut le plus gros à la naissance… 

Les jumeaux, vrais ou faux, de même sexe ou de sexes différents, ont donc une identité propre, qu’il faut respecter. 

Encouragez-les à s’affirmer individuellement !

 Concernant l’habillement : Dois-je les habiller à l’identique ? Ma réponse serait : NON, Ne les habillez pas pareil. Surtout lorsqu’il  s’agit de vrais jumeaux. Evidemment pour vous en tant que maman, il vous est plus facile d’acheter plusieurs T-Shirts, pantalons, robes etc… identiques en même temps… dans ce cas, variez les couleurs, les formes…. 

Pas la peine de leur demander leur avis avant qu’ils soient matures, car c’est une  responsabilité qui ne les arrange pas forcément. Ils feront des choix plus tard, quand ils seront plus sûrs de leurs propres goûts !

Il est vrai que beaucoup de mamans, à commencer par ma propre mère, était de nous mettre en valeur en nous habillant de la même façon, en nous promenant toujours l’une à côté de l’autre, etc… et de « jouer » de notre ressemblance. 

Evidemment, dans notre petite enfance on y trouvait notre compte. Petites, nous étions fascinés l’une par l’autre par notre ressemblance, il nous arrivait de nous faire passer l’une pour l’autre. Finalement étions une sorte de miroir dont ont avait du mal à se détourner ! 

Je comprends que vous puissiez trouver « craquant de voir des jumeaux habillés pareils, mais le problème du choix vestimentaire identique, renforce l’impression que les jumeaux ne font qu’un et ne sont qu’un. Cela peut retarder l’acquisition de leur indépendance et de leur propre personnalité. 

(Je tiens à vous rassurer, aujourd’hui à l’âge de 49 ans, avec ma soeur nous sommes bel et bien indépendantes et avons chacune notre propre personnalité ) 

C’est pourquoi il faut dès le début, essayer de  « séparer » vos jumeaux petit à petit, par des habitudes simples et quotidiennes…

Les jumeaux souffrent-ils d’être «séparés» ?

Évidemment, en tant que jumeaux nous aimons et réclamons la présence de notre frère ou de notre sœur ! Il ne s’agit donc de ne pas les frustrer ni de les faire souffrir !

Bien souvent, les parents qui craignent de les « séparer » et se presser de vite les réunir au moindre pleur se trompent. Ils projettent leur propre désir d’avoir un double constamment.

J’espère que ces réflexions issues de mon expérience vous seront utiles.

La lâcher-prise dans la pédagogie Montessori

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Aujourd’hui je voudrais revenir sur un point plus pratique, auquel toutes les mamans sont confrontées, et qui est crucial dans la pédagogie Montessori : c’est la fameux « lâcher-prise ».

Qu’est-ce que le lâcher-prise dans la pédagogie Montessori ?

Contrairement à certaines idées reçues et à certaines méthodes dépassées aujourd’hui, éduquer un enfant ce n’est pas formater son esprit, mais l’aider à se former seul, à développer son autonomie. Le « lâcher-prise » ne veut en aucun cas dire, qu’il faut renoncer à toute autorité parentale où autre (enseignants). 

L’enfant, pour son bon développement à besoin de règles et limites. Il s’agit simplement d’être vigilant sans être confronté(e) à une lutte frontale et sans pour autant capituler.

La base du « lâcher-prise » lorsqu’on élève un enfant, c’est la CONFIANCE. Confiance en soi, en certaines valeurs que l’on souhaite transmettre, mais aussi et surtout CONFIANCE en son ENFANT. C’est ce qui lui donnera l’énergie vitale pour bien grandir. 

Être dans un cercle vertueux du respect, tout en le sécurisant, respecter la liberté de l’enfant dans la mesure du possible. Vous verrez que très vite votre enfant vous le rendra.

Il n’y a pas d’enfant modèle

Pour cela, un comportement indispensable toutefois, c’est essayer d’abandonner l’idée d’un enfant modèle. En général, nous ne connaissons pas tout d’eux et bien souvent les parents ont tendance à idéaliser leur enfant. Demander à son enfant de faire comme untel (sa soeur, son grand frère, son cousin, son copain etc…) qui est sage, n’aura aucun effet.

Copier les méthodes de nos copines sur leurs enfants est vain, fixer notre attention sur leurs modèles, et uniquement sur elles, c’est négliger l’identité de son propre enfant, ses propres besoins, son rythme et son développement, qui sont finalement l’essentiel.

Être parents, cela s’apprend. L’éducation de nos enfants est faite d’ERREURS autant que de RÉUSSITES. 

Il n’y a pas de parent parfait

Mon petit conseil, c’est de commencer par accepter que le parent parfait n’existe pas, de dédramatiser et cesser de se rendre malade à chaque dérapage. Cela permet de gagner en confiance et de créer pour son enfant une atmosphère sécurisante et rassurante, qui est l’essentiel de ce dont il a besoin avant tout.

Cesser de faire des choses à contre coeur avec ses enfants sous prétexte que « les bons parents le font ». Faire de force quelque chose avec son enfant est contre productif, on risque de se rendre impatiente et désagréable et l’expérience ne sera gratifiante ni pour soi ni pour son enfant qui le ressentira. Toutes nos émotions, l’enfant les perçoit.

Donc cessons de culpabiliser,  pensons plutôt à toutes ces choses que nous faisons ou que nous ferons avec plaisir en compagnie de notre enfant. 

Faire la cuisine avec lui, l’emmener voir une expo, bref passer du temps avec lui et partager des intérêts communs… ne nous sacrifions pas, ça ne sert à rien. 

L’enfant ressentira à coup sûr que vous êtes heureuse d’être avec lui, que vous prenez réellement du plaisir à partager ces activités communes. Cela renforcera vos liens et valorisera votre enfant qui gagnera en confiance.

Principe important de l’éducation. 

* L’éducation, c’est d’abord faire CONFIANCE à l’enfant.

* Il n’y à pas de parents parfait, chacun expérimente.

* Verbalisez, expliquez tout à votre enfant, vous serez surprise de l’effet obtenu.

Expliquer plutôt qu’imposer

Avec les jeunes enfants, il est inutile de combattre où d’imposer des choses.

Il ne veut pas enfiler son pantalon ? Ok, distrayez le quelques instants par exemple montrez-lui par la fenêtre le gros camion qui passe, et reprenez la séance d’habillage une minute plus tard lorsque la pression sera retombée.

Lorsque vous êtes en désaccord avec votre enfant, un seul mot d’ordre : expliquez-lui. 

Par exemple s’il prend le jouet de son camarade ou son frère, expliquez pourquoi il faut le lui rendre : ce jouet est à lui, tu n’aimerais pas, toi qu’on te prenne ton jouet ? Plutôt que de lui arracher des mains et rendre le jouet au copain sans verbaliser.

Autre exemple pour les plus grands :

Expliquez-lui combien il est important de bien travailler à l’école, de rendre tel ou tel devoir. Non pas « parce qu’il le faut » , ce qui reviendrait à une obligation, mais pour son bien à lui, pour son propre avenir. Votre enfant est évidemment digne de comprendre ces explications et se sentira valorisé,  plein de confiance, son estime se fera ressentir et il sera apaisé.

J’espère que cette lecture vous aura servi.

Le développement de l’enfant de 0 à 6 ans

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Je fais aujourd’hui un focus sur le premier plan de développement, c’est à dire sur les caractéristiques et les besoins de l’enfant de 0 à 6 ans.

Les caractéristiques de l’enfant de 0 à 6 ans

Moebelkind

Maria Montessori a nommé l’enfant du premier plan « Moebelkind » soit « l’enfant – meuble » : pour elle le point de départ de ses découvertes est l’adaptation du mobilier à la taille et à la force de l’enfant pour libérer son mouvement. Un enfant a besoin d’avoir les 2 pieds par terre pour accéder à la concentration, pour pouvoir révéler sa vrai nature. 

Un être vulnérable

L’enfant du premier plan est un être vulnérable, sensible qui doit être accueilli en humanité. 

Il a besoin d’ordre et d’attention. 

Un être de communication et de langage

Un bébé est un grand communicant, il a besoin d’être pris dans une relation langagière pour se développer. Le langage et les gestes font partie de la nourriture psychique de l’enfant. 

Un observateur

L’enfant est un explorateur passionné. Il a besoin d’exercer son mouvement pour explorer. 

C’est un explorateur sensoriel. Tout ce qu’il appréhende du monde qui l’entoure passe par les sens. Le premier organe de la découverte est la bouche. A partir du moment où il peut s’assoir, il se détache du sol, la main est libérée et prend le relais pour explorer en manipulant. A travers les sens il construit son monde interne. 

Il a par ailleurs besoin de répéter ses expériences pour construire sa vie psychique et physique. 

Répondre aux besoins par des environnements adaptés

Pour répondre à ces besoins, toute l’approche spécifique de la pédagogie Montessori, comme on l’a vu, consiste à lui procurer des environnements adaptés, qu’on appelle “environnements préparés”. Il y a 4 environnements pour le premier plan de développement :

– La maison (et oui ! on l’oublie trop souvent) : de la naissance à 5-6 mois

– Le Nido : de 3 mois jusqu’à la marche assurée. La marche assurée correspond également à l’acquisition de la pince avec le pouce opposé et aux premiers mots intentionnels. C’est une véritable étape de développement. 

– La communauté enfantine : de la marche assurée à 2 ans et demi / 3 ans 

– La maison des enfants : de 2 ans et demi / 3 ans à 6 ans

Ces environnements présentent des caractéristiques communes :

  • Ordre. Chaque objet, chaque être a sa place et son ordre. L’enfant retire sa sécurité de l’ordre et de son orientation
  • Motifs d’activités = nourriture psychique. Ces motifs constituent la possibilité du travail. 
  • Stimulations sensorielles à la mesure de l’enfant.

Ils ont aussi des différences, sur lesquelles je reviendrai plus tard.

L’adulte aussi fait partie de « l’environnement »

L’attitude de l’adulte (c’est un de mes sujets de prédilection, et j’y reviendrai souvent sur ce blog), doit elle aussi être adaptée, et différente à chaque étape :

Au Nido

  • Observation. De la naissance à la marche assurée l’adulte doit observer l’enfant avec une attention particulière. Ce regard permet de soutenir l’activité de l’enfant. L’observation est inscrite dans une recherche des nouvelles facultés de l’enfant.
  • Attention. Il a besoin de partager, de se nourrir de la relation, qui lui permet d’être de plus en plus autonome en gardant le bon souvenir de la relation. 
  • Intention. Les gestes et la façon de parler a un enfant ont toute leur importance car les enfants sont très sensibles et perçoivent l’intention certainement avant le sens. 

A la Communauté Enfantine

  • Observation
  • Attention = COLLABORATION. L’adulte ne devrait jamais rien faire sans un enfant. On amène l’enfant à participer à la réalisation de toutes les tâches à la communauté comme à la maison. L’autonomie se développe par l’étayage. Tout objet proposé à l’enfant fait l’objet d’une présentation, car la culture se TRANSMET. Cette transmission est formelle ou informelle (l’enfant observe). 
  • Effort Maximum. Le petit enfant est un travailleur acharné. L’adulte doit lui fournir des possibilités d’effort maximum : porter des meubles et autres choses lourdes, cela construit chez l’enfant la confiance, et montre qu’avec un effort, le monde lui appartient. 

A la Maison des Enfants

  • Observation
  • Fournir un environnement permettant les expériences sensorielles, les activités avec un but défini, l’accès à l’écriture et à la lecture des différents langages (mathématiques, langue, musique)

Voila pour l’attitude générale…mais quand et comment intervenir auprès de l’enfant ? Grande question si l’on ne veut pas entraver son développement comme le dit Maria Montessori.

C’est pourquoi dans le prochain post, je vous parlerai des périodes sensibles.

Michel SERRES : la nécessité d’inventer d’inimaginables nouveautés en pédagogie !

Le philosophe Michel Serres nous a quitté, lui qui nous a tant appris sur la vie, les arts et les sciences. Un domaine l’a intéressé en particulier durant ses dernières années de réflexion : l’éducation.

Quelle est son analyse et la grande leçon dans ce domaine pour le philosophe ? 

Dans son discours Petite Poucette : Les nouveaux défis de l’éducation qu’il prononce lors d’une séance solennelle du 1er mars 2011, il nous livre en premier lieu un état des lieux : tout comme Edgar Morin, un changement de civilisation génère un autre corps, une autre connaissance et autre rapport au monde pour le « nouvel écolier ». Michel Serres observe que « ce nouvel écolier, cette jeune étudiante n’a jamais vu veau, vache, cochon ni couvée. En 1900, la majorité des humains, sur la planète, s’occupaient de labourage et de pâturage ; en 2010, la France, comme les pays analogues au nôtre, ne compte plus qu’1 % de paysans. Sans doute faut-il voir là une des plus immenses ruptures de l’histoire, depuis le néolithique. Celle ou celui que je vous présente ne vit plus en compagnie des vivants, n’habite plus la même Terre, n’a donc plus le même rapport au monde ». Il souligne : « Ils sont formatés par les médias, diffusés par des adultes qui ont méticuleusement détruit leur faculté d’attention en réduisant la durée des images à sept secondes et le temps des réponses aux questions à quinze secondes, chiffres officiels ; dont le mot le plus répété est ‘mort’ et l’image la plus reprise celle des cadavres ».

Habiter un nouveau monde…virtuel

Pour Michel Serres, nos enfants aujourd’hui « habitent donc le virtuel. Les sciences cognitives montrent que l’usage de la toile, lecture ou écriture au pouce des messages, consultation de Wikipedia ou de Facebook, n’excitent pas les mêmes neurones ni les mêmes zones corticales que l’usage du livre, de l’ardoise ou du cahier. Ils peuvent manipuler plusieurs informations à la fois. Ils ne connaissent ni n’intègrent ni ne synthétisent comme leurs ascendants. Ils n’ont plus la même tête. Ils n’habitent plus le même espace. Sans que nous nous en apercevions, un nouvel humain est né, pendant un intervalle bref, celui qui nous sépare de la Seconde Guerre mondiale ». De fait, le philosophe qui est également grand-père appuie sa démonstration : « il ou elle écrit autrement. Pour l’observer, avec admiration, envoyer, plus rapidement que je ne saurai jamais le faire de mes doigts gourds, envoyer, dis-je, des SMS avec les deux pouces, je les ai baptisés, avec la plus grande tendresse que puisse exprimer un grand-père, Petite Poucette et Petit Poucet. Voilà leur nom, plus joli que le vieux mot, pseudo-savant, de dactylo. N’ayant plus la même tête que celle de ses parents, il ou elle connaît autrement. »

Mais comme « un atome sans valence, Petite Poucette est toute nue. Nous, adultes, n’avons inventé aucun lien social nouveau. De même donc que la pédagogie fut inventée (paideia) par les Grecs, au moment de l’invention et de la propagation de l’écriture ; de même qu’elle se transforma quand émergea l’imprimerie, à la Renaissance ; de même, la pédagogie change totalement avec les nouvelles technologies. »

Alors… que faire une fois cet état des lieux posé ? 

Puisque « l’apprentissage est métissage » comme il le rappelle dans son Tiers-instruit (1992), il n’y a qu’une seule chose à faire : « Face à ces mutations, sans doute convient-il d’inventer d’inimaginables nouveautés, hors les cadres désuets qui formatent encore nos conduites et nos projets. Nos institutions luisent d’un éclat qui ressemble, aujourd’hui, à celui des constellations dont l’astrophysique nous apprit jadis qu’elles étaient mortes déjà depuis longtemps. ». Ce n’est pas sans rappeler Maria Montessori qui en 1949 conclut une de ses conférences par : « nous avons étudié les moyens d’harmoniser les rapports entre enfants et adultes et nous avons beaucoup appris, mais il reste encore beaucoup à apprendre et à faire. »

Tout est dit…

Cet article est originellement signé de Michel et Fanny Lanternier (Fonds documentaire du CNMN– En guise d’éditorial – Années 1969 -70- 71).

Tout est dit, et l’on vient trop tard, depuis qu’il y a des hommes, et qui pensent…

Il semble que l’on pourrait dire à propos de l’enfant, que « tout est dit », si l’on en juge par l’énorme richesse, ou, comme certains le pensent, l’énorme fatras publié à propos de l’enfant. Est-il donc nécessaire d’en écrire encore…?

La pensée de Maria Montessori, quand on a eu la chance de pouvoir l’étudier, l’expérimenter, la traduire en langage de notre époque, apporte, nous semble-t-il, un fil conducteur continu, une lumière calme et réconfortante, soleil à côté des éclairs spasmodiques et souvent inquiétants qui précèdent d’habitude l’orage, projetés au hasard des courants psychologiques ; un amour respectueux du côté de la vie à côté de recettes qui la font supporter ; enfin, surtout un bon sens si solide et si constructeur que l’on ne peut se refuser d’en faire profiter ceux qui sont en recherche.

Connaître les étapes de la croissance de l’enfant

N’est-ce pas là une clé du problème ? Un enfant de six mois ne se traite pas comme un enfant de quelques jours, et encore moins comme un enfant de trois ans. Savoir et sentir profondément que cette croissance se fait dans le sens de la finalité à atteindre, non pas au hasard de la chance, mais suivant des lois précises qui, si elles ne sont pas respectées, occasionnent des déviations importantes.

L’enfant acquiert le mouvement, la marche, le langage, l’ordre, s’il trouve dans l’ambiance qui l’entoure, au moment voulu, une aide et un stimulant. Comment pouvons-nous être une aide dans ce mouvement vers le « Plus être », dont parle TEILHARD DE CHARDIN ?

Si l’enfant de quelques mois qui regarde la bouche de sa mère avec une intensité qui nous frappe, afin d’acquérir le langage, se trouve devant une bouche tendue, aux lèvres crispées par le désir ou le besoin de « faire vite », à cause de la tension nerveuse amenée par un rythme de vie souvent inhumain, cet enfant sera lésé dans un des besoins les plus profonds de son être, puisqu’il cherche à acquérir une des plus grandes caractéristiques de l’homme : « pouvoir  s’exprimer ». Cet enfant criera, manifestera par sa colère ce qu’il ne peut exprimer par des paroles ; il n’est pas compris.

Ceci est valable pour un moment précis de sa croissance ; mais ne faisons pas l’erreur de croire que ce besoin n’évoluera pas, et qu’après l’acquisition du langage syntaxique, il n’aura pas à acquérir encore, au fur et à mesure de son développement et à perfectionner ce langage. 

Observer et situer l’enfant

Situer l’enfant par rapport à ces lois de croissance et dans l’optique de sa finalité, n’est-ce pas là l’essentiel de ce que Maria Montessori nous apporte ?
Vingt-cinq ans d’observations faites en milieu d’enfants ni privilégiés, ni handicapés, de milieux absolument divers m’obligent à penser que Maria Montessori nous ouvre une voie très sûre, où nous devons avancer, chacun selon notre personnalité, découvrant petit à petit, sans brûler les étapes, ce qui peut rendre les enfants heureux.

A la poursuite du bonheur

Car ce n’est que dans la poursuite de notre finalité que nous pouvons trouver un bonheur vrai, et ce bonheur nous savons qu’il n’est jamais atteint une fois pour toutes : il est une marche en avant. 

La place de l’adulte dans la pédagogie Montessori

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Lorsque je suis entrée dans ces classes spécialisées, j’ai rencontré des enfants qui avaient non seulement une déficience intellectuelle, mais de grandes difficultés d’ordre physique de types hémiplégie, paraplégie, déficience visuelle, crises d’épilepsie. 

Montessori c’est révolutionnaire !

De ce fait ces enfants étaient toujours accompagnés voir assisté et très souvent on faisait les choses à leur place. Et moi j’arrive en disant « Et bien, on va arrêter tout ça ! » J’ai déclenché un vent de panique ! Et tout à coup, Montessori est devenu dangereux ! Je savais que nous étions à la veille d’une grande révolution ! Et là, je me suis rendu compte que le plus grand travail à faire n’est pas avec les enfants, mais avec les adultes. Vous savez, ce sont les adultes qu’il faut changer, pas les enfants !

Il est vrai que nous avons actuellement une culture du contrôle et de la peur. Plus nous voulons protéger l’enfant, plus nous le contrôlons. 

Et pourtant, nous souhaitons que l’enfant, là où il en est et avec ce qu’il peut faire, développe sa confiance.

Mais comment pouvons-nous favoriser le développement autonome de l’enfant si nous court-circuitons en permanence son développement y compris dans des situations sans risque ? Comment l’enfant ne peut-il pas douter de lui-même quand nous intervenons sans cesse pour « corriger » ce que nous nommons trop communément « erreur » ? Et comment peut-on ouvrir à l’enfant des espaces d’apprentissages dans une culture où nous avons pris l’habitude de « parler » quand nous pourrions simplement « montrer ».

La confiance n’est pas un sentiment, elle relève de l’observation

Dans notre culture nous pensons beaucoup mais nous observons peu. Or, l’observation attentive d’une situation peut nous permettre de prendre une décision adaptée. 

Or, nous avons fini par amalgamer la confiance avec un sentiment. Dans le langage courant nous utilisons souvent ce « sentiment » lorsque nous disons par exemple : « je sens que je peux avoir confiance en toi ». Pourtant, l’enjeu n’est pas de « ressentir » ce qui laisserait alors beaucoup de marge au risque et à l’incertitude mais d’observer la disponibilité d’une capacité au regard d’une situation donnée. Ainsi l’observation permet d’évaluer la fiabilité d’une habileté à se déployer dans une situation qui peut la mobiliser.

Exemple : petite fille et le plateau.

L’enfant a réalisé 2 choses :

  • que de faire tomber l’objet n’était pas grave ! Elle pouvait ramasser puis recommencer. Au début elle attendait qu’on vienne. Elle a observé pensant qu’on allait la gronder, mais non, nous l’avons encouragé à ramasser comme elle pouvait.
  • Qu’elle pouvait porter la corbeille seule d’un point à un autre sans renverser. 

Je ne pourrais pas avec les mots décrire sa joie ! 

Pourquoi la joie de cette enfant a été rendue possible ?

Parce qu’il y a eu un minimum d’intervention, voir pas d’intervention du tout 

Quelques soit les difficultés de l’enfant, que ce soit pour acquérir des connaissances utiles ou pour développer une habileté, les enfants ont tous leur propre rythme et ce rythme est à respecter. 

Semblable à une plante, on peut accompagner leur poussée par quelques gestes favorables. Mais la poussée viendra en définitive par elle-même. A vouloir la provoquer, la récolte n’en sera que compromise.

L’enseignante a fait le même parcours que l’enfant

Il a fallu stopper son élan pour aller secourir l’enfant plus d’une fois !

Et puis un jour, elles ont compris, que l’enfant procède par tâtonnements afin de réaliser une activité. En répétant de multiple fois la somme de gestes qui peuvent conduire à un résultat, il acquiert la conscience du temps nécessaire à l’actualisation d’une réalisation et la patience pour la conduire à son terme.

Grâce à l’observation des enfants la peur a disparu et surtout la fausse croyance qui est de croire que pour être une bonne enseignante il faut aider aider à tout moment les enfants. 

L’ambiance des 2 classes a complètement changé.

La place de l’adulte dans la pédagogie Montessori : ce qu’il faut retenir

  1. La confiance n’est pas un sentiment, elle relève de l’observation
  2. Pas ou peu d’interventions sauf s’il y a un « vrai » danger

Mon cadeau

« Libérez le potentiel de l’enfant et vous transformerez le monde avec lui » Maria Montessori